Brocante et concept store

Il y a des villes "concept store" et puis il y en a d'autres qui sont plutôt "brocante". Zagreb, c'est la ville brocante dans tous les sens du terme.

A première vue, tout est fait pour repousser le promeneur le plus averti. Ses façades lugubres en phase terminale de délabrement, ses cours qui ont il y a bien longtemps perdu de leur charme, et sont passées au registre uniquement fonctionnel, les innombrables graffitis dont l'ambition n'est pas de véhiculer un message, sinon celui de la disgrâce, les cicatrices laissées par les rénovations en tout genre, gommant le Baroque et l'Art nouveau en une après-midi...

Mais comme à la brocante, avec un peu de chance, il arrive que l'on soit pris au dépourvu, et sans vraiment chercher, on tombe sur une perle. C'est au détour d'une rue qu'on est pris par surprise par une porte en bois magistrale ayant survécu à la mode du PVC. Tout à coup, un escalier montant vers la ville haute nous emmène 100 ans en arrière. La capitale si mal éclairée par des réverbères à la lumière jaunâtre jouit d'un charme irrésistible les soirs d'hiver, lorsque le brouillard se fait épais et que les pas se font méfiants.

Est-il possible de trouver de l'élégance dans la désolation d'un immeuble tellement marqué par le temps et la négligence humaine? Zagreb devrait-il envier ces villes concept store où tout est méthodiquement étudié afin de charmer l'œil du potentiel client, dans lesquelles rien n'est laissé au hasard, mais où au bout du compte, les spécificités et le charme originel sont balayés en un coup de restructuration urbaine?